Principes Shito-Ryu

Loi de Newton : les lois deux et trois sont applicables dans tous les arts martiaux.

SHIN – GHI – TAI

L’Esprit, l’Âme et le Corps, c’est Shin-Ghi-Taï. Dans une école de Karaté-do, une grande importance est accordée à la beauté du style car c’est ce travail qui touche l’âme de chacun. Et l’âme c’est « l’échangeur » qui permet à l’esprit de se manifester dans le corps et au corps de partir à la découverte de l’esprit. Ainsi uni l’être peut vivre sur la Terre comme au Ciel, dans le monde matériel de notre quotidien comme dans l’éternité du monde divin.

1- Comment le Karaté-do structure l’individu

Il existe sur le chemin de l’évolution spirituelle en karaté des points forts sur lesquels un adepte doit s’appuyer consciemment afin de structurer son travail. C’est pourquoi dans la tradition des arts martiaux il est conseillé de développer harmonieusement le principe Shin-Ghi-Taï.

  • Shin représente l’esprit,
  • Ghi représente la technique et la Voie,
  • Tai représente le corps et la réalisation.

Le triangle Shin-Ghi-Taï est le fer de lance du karatéka.

Comment appliquer la trinité Shin-Ghi-Taï à l’entraînement Karaté ?

Shin

Se développe par le Kihon ( littéralement Ki = énergie, Hon = fondamental ).

  • Le travail est concentré sur le temps et le rythme.
  • Il consiste à répéter de nombreuses fois et d’une manière cadencée un geste unique.
  • C’est un travail d’approfondissement qui demande de la volonté et de la persévérance.
  • La pratique de Shin révèle une source d’énergie, le plus souvent ignoré, qui se manifeste par une compréhension supérieure et des facultés nouvelles. La foi est le premier résultat de la pratique de Shin, la foi en l’esprit. Le sens du chemin s’éclaire et l’idéal auquel on aspire se définit nettement. Ainsi la vie gagne en intensité.

Ghi

Se développe par « la voie des formes » : le Kata. Le travail est étendu sur l’espace aux différentes positions, aux mille et une manières de faire, c’est la technique, c’est-à-dire :

  • la connaissance des armes naturelles,
  • de la stratégie du combat, des lois du mouvement.

La pratique de Ghi révèle petit à petit un goût nouveau pour ce que l’on fait, c’est l’amour de la technique qui se traduit par une conviction inébranlable. Et c’est cette conviction, cet élan, cet enthousiasme, qui permet de suivre la Voie.

Tai

Se développe par la confrontation à la réalité du combat (Shiaï).

Se développe à la « dure » réalité de quelques planches de bois qu’il faut briser, c’est le test de casse appelé Tame-Shiwari. Le Shiaï et le Shiwari mesurent l’efficacité du corps mais aussi la justesse de la technique et la force du mental.

La pratique de Tai révèle en nous des capacités insoupçonnées ; comme une nouvelle puissance.

  • Tai conduit inéluctablement au courage
  • à la volonté d’entreprendre et de réussir.

Ce travail conscient enrichit donc l’adepte qui passe par des degrés :

  • les Kyu (degrés jusqu’à la ceinture noire)
  • les Dan (degrés après la ceinture noire).

Quand un élève souhaite gravir un degré et qu’il prétend passer un grade supérieur il est vérifié sur les trois plans Shin-Ghi-Taï.

  • Tout d’abord il lui est demandé une technique juste (Ghi) : des positions et des postures correctes ; une respiration libre et en place ; un bon timing, un bon placement, une bonne mobilité; stabilité; équilibre; souplesse…il faut qu’il ait du style. En un mot, sa technique doit être belle : on aime ce qu’il fait, voilà le critère.
  • Puis il lui est demandé une efficacité réelle (Tai) : la victoire en combat. La puissance de son style doit être prouvée. Sa volonté d’avancer sur la Voie doit être visible. Il faut qu’il ait de l’énergie, de la vitalité, du tonus… Résultat ? Ce qu’il fait est plein de vie et on a aussitôt envie de faire comme lui; il nous entraîne dans son mouvement.
  • Enfin on vérifie surtout si l’élève a bon esprit (Shin) : est-il à la hauteur des connaissances qu’il a acquises et de la puissance qu’il a développée ? On ne doit pas oublier que dans le karaté-do cette connaissance peut tuer. On vérifie qu’il possède, à son niveau de compétence, l’attitude mentale de respect et de bienveillance qui marque sa capacité à faire bon usage de ses nouvelles forces, que ce qu’il fait est bien.

A chaque fois qu’un professeur ou qu’un Maître participe à un passage de degré, il veille à la cohérence de ces trois critères : Shin l’esprit, Ghi la manière, Taï l’action.

2. Application des principes du Shin-Ghi-Taï

Taï : le corps physique

Le Karaté-do est une science. Cette science s’appuie sur l’étude rationnelle des armes naturelles du corps, des points vitaux du corps humain et des différentes manières de combattre. Tai concerne principalement le corps, le physique, l’action, l’efficacité, la réalisation. Il est difficile de développer le principe Tai ; ce qu’on pourrait dire simplement c’est que tout travail physique nous conduit a être tonique, vivant et en bonne santé. Ces trois éléments créent les conditions pour que le courage et la volonté se développent à leur tour. Voilà le schéma. Taï est la base de tout ce qui touche l’équilibre , la stabilité, la souplesse, l’énergie. Exercer son corps en endurance, en résistance, en souplesse ; le plier, l’étirer; apprendre à respirer, à bouger, à marcher : c’est Taï. Alors on devient tonique car le tonus exprime l’état de disponibilité des dispositifs fonctionnels du corps. Le tonus relève de l’harmonie des différentes fonctions du corps ; c’est une expression générale de la vigilance. Il conditionne l’état d’alerte de la musculature et sa capacité à répondre. Les exercices de base, pour avoir un principe Taï bien développé, sont nombreux. Ceux qui concernent le Hara sont les plus importants. On peut se concentrer sur le Hara mais aussi sur le plexus solaire, sur les mains, la nuque, la plante des pieds, etc., et faire différents exercices comme, par exemple :

L’activité télé cinétique :

Celui qui consiste à projeter en avant le mouvement ou le geste dans l’espace avant de la faire. C’est un positionnement directionnel nommé l’activité télé cinétique.

Cela signifie qu’on évalue la distance entre soi et l’adversaire en préméditant l’action.

Ou encore cet autre exercice Tai que l’on nomme :

Réaction géotropique :

Qui consiste à positionner correctement la tête pour laisser circuler librement les énergies et permettre une action décisive.

C’est un positionnement sensoriel à pratiquer constamment avec attention. Le principal sens de l’équilibre étant situé dans l’oreille interne, on comprend le rôle essentiel du port de la tête dans la pratique du karaté.

Mais l’action de Tai est comme rattachée à tout ce qui nous permet de sentir. Comme par exemple le fait de sentir l’équilibre des forces en nous :

  • entre les deux poings
  • entre les deux pieds
  • entre la tête et les pieds
  • entre l’adversaire et nous-mêmes

Sentir notre assise sur le sol renforce la stabilité du mental. La chose primordiale à défendre dans le karaté, c’est le Centre qui, dans Taï, est le centre de gravité du corps. C’est lui qu’il faut préserver pour conserver l’équilibre et la vie.

L’état mental de combat appelé Zanshn influence le corps qui lui aussi devient libre, disponible et prêt à tout. Ce corps-Taï est animé par le souffle. Le souffle est le premier allié du karatéka qui veut renforcer le principe Taï en lui car il régularise les tensions. Le souffle Ki est le fil conducteur qui permet de tout orienter dans le même sens, simplement parce qu’on peut agir sur lui volontairement. L’air vital Ki équilibre et unit les fonctions principales pour :

  • comprendre ce qui se passe,
  • sentir vraiment de quoi il s’agit,
  • et agir correctement.

Pendant de longues années on doit s’occuper de développer Taï car il est impossible d’aller plus haut sans énergie, sans puissance, sans volonté; tout simplement sans une santé solide. Pour cette raison le fondateur du Judo, Jigoro Kano Shihan, a dit qu’il est nécessaire de s’occuper du principe d’énergie en priorité. «L’emploi optimum de l’énergie» d’abord ; puis «l’entraide et la prospérité mutuelles» seront réalisables. C’est vrai car pour pouvoir donner il faut être riche en quelque chose. Donc le Maître, qui était un grand sage, nous conseille d’être d’abord riches, forts, efficaces, en bonne santé, pour pouvoir réaliser les projets les plus nobles pour soi et pour les autres. C’est pour cela que celui qui se consacre à développer le principe Taï, le côté physique, les expériences, est sur la bonne Voie du Karaté, à condition de savoir auparavant pour quoi il travaille, pour qui, au nom de quel idéal.

Ghi : la méthode, la technique

Si Shin, l’esprit, décide, gouverne, Ghi oriente le travail physique, organise les forces et canalise l’énergie. C’est la Voie technique des « stylistes ». La pratique des Kata, le travail technique, toutes les méthodes qui font du karaté-do un art, appartiennent au principe Ghi. Tout ce qui peut aider à « transformer la Pierre en Sabre », à rendre les gestes et les mouvements beaux, harmonieux, efficaces, donne au karatéka le moyen de développer Ghi : le style. Entre les deux autres principes, Ghi est la charnière corps esprit : il se sert de l’unité du corps (santé, tonus) et de l’unité de l’esprit (détermination, clarté).

Les Kata, qui sont des formes techniques et tactiques, nous restructurent mentalement et physiquement juste parce qu’ils sont harmonieux. En fait les Kata nous apportent sur les trois plans Shin-Ghi-Taï car ils nous structurent techniquement, ils nous rechargent en énergie et nous renforcent spirituellement, comme des postures de Hatha-Yoga. Pour que le rythme coule bien dans les Katas, l’esprit doit être fort et limpide. Ainsi les « formes » du Karaté prennent vie. Les techniques sont claires, nettes ; le sens des gestes est évident: c’est l’esprit des techniques. Quant au « corps » des techniques, l’instrument, il doit être vif et souple car un corps vif et souple se moule plus facilement dans les formes qu’un corps rigide et dur. Pour avoir du style en Karaté, il faut avoir l’esprit libre et le corps souple ; à cette condition on peut développer le principe Ghi à travers les Katas. A chaque fois qu’on réussit à entrer dans une technique particulière, elle nous « impressionne », elle nous imprime quelque chose de subtil, d’indéfinissable. Et petit à petit on s’aperçoit qu’on est sculpté comme ça, presque à notre insu. Et on commence à avoir du style.

C’est le pouvoir des Katas ! A ce stade le plaisir de gagner est remplacé par la joie que donne le travail bien fait. On devient compétent puis confiant, enthousiaste… C’est cet élan qui nous permet d’aller plus haut, c’est là que s’ouvre le véritable chemin de la connaissance, avec le principe Ghi, le chemin, la Voie, la Manière.

Shin : l’esprit

Le travail du principe Shin commence par le travail sur soi c’est-à-dire un travail intérieur, spirituel, un travail de disciple. On sera habile, adroit, efficace, courageux, décidé, à la mesure de notre force intérieure. La force mentale permet de vaincre avant d’entreprendre un combat ; ce qui suit à moins d’importance et ce ne sera que conséquence ; ce n’est que lorsque tout est résolu intérieurement que l’on peut agir véritablement. Quand un problème survient, Shin décide car le mental comprend ce qui se passe, c’est clair pour lui, il est le centre, au -dessus. Alors il voit et conseille. Il donne la stratégie. Puis Ghi sélectionne la tactique pour accomplir ce que la tête a décidé. Et Taï, le corps, exécute l’action. La tête décide, le coeur accomplit, le corps réalise.

L’état d’esprit que développe en nous le principe Shin est un état d’éveil mental pendant lequel les pensées sont claires: l’esprit en alerte, ouvert, vif. Tout l’être est « ici et maintenant ». C’est cela Zanshin. Pour parvenir à cette liberté d’esprit il faut allier deux grandes forces : la souplesse du mental (l’intelligence), et la fermeté de l’esprit ( la détermination, la Volonté ) .

Quand le karatéka sur la Voie est « un chercheur zélé et sincère » comme il est dit dans le yoga de Patanjali, il fait tout pour acquérir les qualités de Zanshin. Sans entrer dans le détail des exercices voici quelques mots-clés qui tournent un peu autour de cet état d’esprit :

  • la vacuité
  • le non-mental
  • la spontanéité
  • le non-agir
  • le fait d’être sans but, désintéressé, sans artifice, simple, alerte, ouvert, décidé
  • le fait d’aller de l’avant, sans hésiter, conscient et éveillé
  • Naturel

Il est utile de connaître ces particularités du principe Shin et de les maîtriser par la méditation afin de les approfondir pour tenter ensuite de les mettre en pratique. Dans la trinité Shin-Ghi-Taï, Shin est le centre lumineux; c’est par lui qu’on doit commencer et c’est à lui qu’on arrivera.

3. Les trois maîtrises

On peut résumer ce travail de Shin-Ghi-Taï en disant que pour vivre en paix il faut constamment harmoniser les trois plans du corps, du cœur et de l’esprit. Pour ce travail nous avons à disposition une force formidable : Ki, l’énergie qui circule à travers nous. En fait, comme le précise Me NORO, l’énergie fondamentale a une double nature : la force qui descend du ciel vers la terre à travers l’homme ( les japonais la nomment « la force de l’eau » Mi ) et la force qui monte de la terre et traverse l’homme ( « la force du feu », Ka ). Ces deux courants de force se croisent dans le centre-Hara au sein duquel le kikaï-tanden ( le « Centre du Centre » ) travaille en liaison étroite avec le plexus solaire ( le « Cœur énergétique » ). Il est intéressant de noter que le mot Dieu dans la langue japonaise se dit Kami, soit « Feu-Eau ». C’est donc grâce à cette énergie divine que nous pouvons accomplir le travail d’harmonisation de Shin-Ghi-Taï. Notre être est structuré de telle façon qu’on ne peut échapper à ce processus d’évolution: on est obligé d’évoluer! Selon Henri Plée, cet élan naturel commence pour le karatéka par la maîtrise physique. A ce stade, où Taï domine, le travail renforce la personnalité, puis viennent les première victoires… Son ego prend de la puissance.

Arrivé au stade de la technique, l’élève entre dans la recherche vraie. Il découvre ses illusions et en même temps il prend conscience de ses acquis, de ses possibilités et du chemin qu’il lui reste à parcourir. Alors il mise tout sur la maîtrise technique, il veut être un technicien, un maître en la matière. Il apprend peu à peu à se connaître, il retrouve sincérité et humilité. Son ego perd de la force.

Au stade de l’esprit, l’élève s’éveille. Il développe son intuition et découvre le sens de l’unité. Il reçoit et rayonne les énergies ; il donne autour de lui ce qu’il a acquis, ses richesses. C’est la manifestation spirituelle.

HYOSHI

La cadence, le rythme.

C’est une notion essentielle dans la manière de mener un combat pour arriver à la victoire. On peut définir HYOSHI comme une suite d’intervalles rythmiques constitués à la fois d’espace et de temps (l’espace étant une notion subjectives car dépendant du temps que l’adversaire peut mettre à le parcourir) qui séparent deux combattants. Le contrôle de la cadence du combat, qui permet d’entrer en harmonie avec le mouvement (ou l’intention de mouvement) de l’adversaire, mène à la victoire lorsque l’On reprend soudain l’initiative en créant brutalement une discordance dans cette harmonie, car cette discordance surprend l’autre et ne lui permet plus de réajuster la cadence à temps. L’adversaire se fige alors un instant dans ce vide rythmique, d’où l’image de « frapper après avoir gagné » ou de « casser le rythme et gagner ».

La pratique du Kata permet de comprendre son propre HYOSHI et celle des combats conventionnels permet de comprendre celui de l’autre, de s’y adapter et d’apprendre à le contrôler.

UKE NO GOGENSOKU

Les cinq principes du karaté SHITO RYU, tels qu’ils ont été posés par son fondateur MABUNI KENWA.

Rakka = casser l’attaque par un blocage

Kushin = mobilité verticale du bassin

Ryusui = « fluidité de l’eau » coller à l’adversaire

Ten-i = esquive, pour se placer pour le contre

Hangeki = simultanéité de la parade et de la contre-attaque

SUNDOME

Contrôle d’un coup, vigoureusement stoppé, avec sensation de KIME à faible distance du point d’impact visé..

Sun = courte distance

Dome, de Tomeru = stopper

Contrairement au Karaté Sportif, où les coups sont plus ou moins retenus en fonction des règles posées ou du port ou non de protections, le karaté traditionnel imposait SUNDOME dans le cadre du dojo pour éviter tout accident grave.

TAIYO

Taiyo était un terme utilisé par le Kenpo chinois ou Quanfa.

Taiyo est la combinaison de 2 idéogrammes « TAI » et « YO ».

Concernant l’idéogramme « TAI » (voir aussi) ce terme fait allusion au renforcement et au conditionnement de son corps en général.

Dans l’École Shorei,

Dans le contexte des arts martiaux anciens, cela impliquait le renforcement même du corps pour éviter de sentir la douleur et/ou d’être blessé par un adversaire lors d’un combat. En d’autres mots, la méthode Shorei recommande le principe de « TAI », puisqu’il démontre le mieux la capacité de résister à la douleur par les qualités d’un conditionnement physique accru.

Dans l’École Shorin,

En opposition avec le principe de « TAI » (le conditionnement du corps) il y a le « YO ».

Le principe « YO » implique dans ce cas-là la performance, la flexibilité, la capacité d’éviter d’être frappé avec une accentuation sur le fait de répondre rapidement à l’attaque de l’adversaire.

Selon l’École Shorin, les poings d’un adversaire ne sont pas différents d’un sabre. Donc, il faudrait à tout prix éviter d’être frappé même si cela devrait être ou devient une frappe singulière.

En faisant face à un opposant lors d’un combat il était recommandé de créer une divergence pour prendre l’avantage sur ce dernier et de le battre.

Le principe de « YO » était et est toujours le foyer central de l’entraînement du Shorin. Ce principe démontre le mieux la nature de cette méthode.

Malgré l’avantage évident de chaque principe (la force versus la performance) il serait avantageux de fusionner ces deux principes lors des entraînements afin que la vraie valeur de « TAIYO » prenne tout son sens.

Au sein de l’école Shito-Ryu, nous nous efforçons de poursuivre l’enseignement de maître Mabuni qui a combiné ces 2 méthodes qui sont le SHOREI (Naha) et le SHORIN (Shuri).